Autocensure, quand les candidats s’éliminent eux-mêmes

16 février 2024

Une étude de l’EM Normandie sur « l’auto-censure » a révélé que plus d’un salarié sur deux ne postule pas aux emplois qui les intéressent, même s’il possède les compétences et l’expérience nécessaires. PHI RH vous explique pourquoi et comment y remédier.

Voir des offres d’emploi intéressantes qui correspondent à leurs compétences et ne pas postuler, c’est la réalité de nombreux Français. Selon une étude récente de l’EM Normandie, plus d’1 personne sur 2 s’autocensure lorsqu’on lui présente une offre d’emploi qui lui convient.

Véritable peur de l’échec

Pour arriver à ces résultats, l’étude s’est basée sur les recherches d’emploi de 165 comptables généralistes, qui ont tous reçu des annonces ciblées en termes de compétences et de localisation. Les conditions d’emploi doivent être idéales. Cela comprend une rémunération attrayante, des possibilités de travail à domicile et des perspectives de développement.

Les résultats ont été étonnants. Seuls 46% des participants ont décidé de postuler. Pour ceux qui ne voulaient pas tenter leur chance, cette décision a été principalement motivée par une évaluation de la probabilité de succès (81,1 %), puis par affinité avec l’entreprise (11,3 %) et enfin par poste (7,6 %).

Ainsi, les demandeurs d’emploi ont constaté qu’ils préféraient ne postuler qu’aux offres qui, selon eux, avaient une chance de succès, plutôt que d’augmenter considérablement leurs chances. Une forme de gestion du risque guidée par la peur du rejet et ses effets psychologiques.

L’échec a un coût psychologique : il atteint l’estime de soi, notamment celle de ceux qui sont déjà en situation de fragilité. Puisque l’acte de postuler est le choix d’investir des ressources dans l’espoir d’un gain, il s’apparente à une stratégie.

Candidats aux carrières « non linéaire »

Autre facteur important dans cette étude : les candidats dont les profils ne sont pas « linéaires », c’est-à-dire les candidats aux parcours chaotiques, comme avec des périodes de chômage qui s’enchaînent, s’autocensurent davantage.

Les candidats les moins attractifs se découragent de postuler et de participer aux processus de sélection. Ils ne peuvent que limiter leurs chances d’obtenir un emploi. mais ils s’offrent d’autant moins l’opportunité de se rassurer, de peaufiner leurs documents de candidature ou d’apprendre à gérer les aléas liés au recrutement.

« Les candidats pensent trop souvent que les recruteurs vont privilégier le « beau candidat », celui qui aura un parcours linéaire, au « bon candidat », celui qui aura les compétences requises, même si c’est dans une autre branche d’activité », explique Jean Pralong, professeur en ressources humaines digitales et gestion des carrières à l’EM Normandie.

Pour illustrer son propos, il donne l’exemple d’un entraineur de foot : dans l’imaginaire collectif, les compétences associées relèvent du sport et non pas du management. Dans les faits pourtant, cet entraîneur aura acquis des compétences en management grâce à cette expérience. « Il ne faut pas réduire les compétences au parcours inscrit sur le CV et il faut que les candidats apprennent à parler de leurs parcours », préconise le professeur en école de commerce, Jean Pralong.

Entre évitement du risque et sélectivité

« Ils savent que leurs parcours ne sont pas idéaux. Mais ils prennent plus souvent le risque de soumettre leurs candidatures, notamment par affinité avec le poste. Ils sont principalement intéressés par les missions présentées par l’annonce ».

« La rareté des candidatures n’a donc pas le même sens et les mêmes causes : évitement du risque et de la déception chez ceux qui se supposent peu attractifs, sélectivité chez ceux qui, au contraire, ont plus de cartes dans leur jeu. L’acte de postuler n’est ainsi pas uniquement la décision rationnelle qu’on imagine spontanément » conclut l’étude.

« Tenter sa chance veut dire prendre le risque d’avoir des réponses positives et négatives »

À l’issue de cette étude, l’EM Normandie veut motiver les candidats à ne pas s’autoéliminer : « Personne n’a envie de se prendre des murs mais il faut comprendre que tenter sa chance va de pair avec le risque d’avoir des réponses positives et négatives ».

Avis aux recruteurs, l’étude de l’EM Normandie vous préconise de ne pas se limiter aux CV pour évaluer les compétences de leurs candidats (des tests spécifiques existent pour cela, Chez PHI RH, leur utilisation est systématique). Enfin, faites savoir, dès l’offre d’emploi, aux candidats comment leurs compétences vont être évaluées. Vous éviterez ainsi cette autocensure qui ne cesse de croître.